Un carnet en 2011
Il y a une semaine, Fontevraud. Deux nuits, deux jours, hors saison, dans l'enceinte de l'Abbaye, hors du temps aussi. La Loire, les vignes dénudées sous un ciel gris, le vent et la pluie fine. Certains n'en voudraient pas, moi j'aime. Le matin nous avions l'abbaye pour nous seuls, l'odeur des tuffeaux humides, le silence et nos chuchottements.
Fin tardive d'un déjeuner face au fleuve, café. Quelques mots échangés avec la femme qui nous a aimablement servi. Je lui dit que j'aime les environs, que j'aime la Loire. « Nous n'avons aucun mérite » me dit-elle, « ici la région est simplement restée dans son jus ».
Dernier déjeuner. Tout à l'heure nous marcherons sous la pluie, dans les
feuilles mortes et la crainte de quelques plombs perdus, les fusils sont
proches. Je veux voir l'abbaye depuis la forêt.
Le garçon qui nous sert porte un tablier blanc, une chemise proprement
fermée au col par une cravate. Élégance simple, tout autant que les gestes
de son service. C'est un art que de bien servir, un art de l'attention, et
je m'en nourris tout autant que de ce qu'on me sert.